Dandys désabusés en complets émeraude
Qu’un gilet vert de myrte rehausse de soie
Comtesses décaties dont le fard qui s'érode
Fait entrevoir l’appel pressant de l’Au-delà
Filles de music-hall, égéries d’un hiver
À qui les feux de la rampe ont communiqué
Cet éclat maladif des mauvaises lumières
Reflet cadavérique aux teintes faisandées
Ils hument lentement les tabacs les plus fins
Dans des fume-cigarette étrangement longs
Ils aiment Paul Adam, Rachilde, Jean Lorrain
Rodenbach, Rollinat et Rémy de Gourmont
Tous fœtus avortés d’un siècle pourrissant
Les nerfs usés par ses effluves délétères
Le cerveau détraqué des derniers décadents
Ne s'émeut plus que de plaisirs crépusculaires
Femmes dont la beauté inhumaine et diaphane
Est un peu ternie par la morphine et l’opium
Erotomanes mais surtout éthéromanes
Elles vont à l’orgie comme à un Te Deum
Poètes oubliés pour n’avoir rien écrit
Cultivant le panache avant d’avoir la plume
Monomanes n’ayant pas trouvé leur manie
Des Esseintes ratés que le pavot embrume
Névrosés insomniaques, bouquets de chloroses
Noctambules par la simple force des choses
Vierges blanches et pures sorties du couvent
Venant au sacrifice une prière aux lèvres
Putes syphilitiques aux gestes traînants
La bouche consumée par le vice et la fièvre
Jeunes gens élégants à la face trop glabre
Les yeux ardents de quelque rêverie macabre
Puis dans la pénombre quelques êtres larvaires
Se tenant en retrait, blanchâtres et calcaires